J’ai lu « Dynamiques paysannes et souveraineté alimentaire »

Le livre est de Amadou Makhourédia DIOP, mathématicien et économiste. L’auteur est l’ancien chef du département d’Économie et de sociologie rurales de l’ENSA de l’Université de Thiès. Il a pour titre : Dynamiques paysannes et souveraineté alimentaire – Le procès de production, la tenure foncière et la naissance d’un mouvement paysan.

Le livre décrit les stratégies développées par les paysans sénégalais et les dynamiques qui animent les exploitations agricoles familiales

Dans son œuvre, Diop décrit les stratégies développées par les paysans sénégalais et les dynamiques qui animent les exploitations agricoles familiales pour la production de biens nécessaires pour leur survie. Il a mené des enquêtes en 2007 qui lui ont permis de tracer les lignes du document. L’ouvrage est divisé en deux parties, avec une première, axée sur les définitions des termes clés et la méthodologie.
-La première partie traite des contraintes et des mutations de l’agriculture sénégalaise. L’auteur y développe notamment le procès de la production, les problèmes actuels avec un accent particulier sur la question du foncier dans le Kajoor et la Loi sur le Domaine National. C’est dans cette partie qu’il débouche concrètement sur les façons dont les activités agricoles s’organisent et nous montre sur quels angles elles se basent : la sociologie et le climat en partant des us et coutumes. L’auteur ne manque pas non plus de nous expliquer la perception du foncier en milieu rural et toutes les dynamiques juridiques autour.
-La seconde partie porte sur les stratégies paysannes et les modes d’organisation. Cette partie présente une analyse des stratégies d’adaptation aux mutations agricoles. Autrement dit, des méthodes utilisées par les paysans pour faire face aux crises. De la production et de la transformation agricoles entre les initiatives collectives et individuelles et enfin de l’action des autorités pour un développement agricole.

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Mes impressions

J’ai sincèrement aimé le livre. Je ne cacherai pas que j’ai mis six mois pour le lire. Mais après avoir fait le cours d’Économie rurale, j’ai été profondément motivé pour le terminer. Chaque point du livre montre qu’il a fallu un travail fastidieux pour sa réalisation. Le réel est bien expliqué avec un vocabulaire accessible. Les mots en wolof bien orthographiés reviennent souvent. Les différents aspects de la vie paysanne dans le Njambur sont abordés sans aucun jugement de valeur et loin des préjugés actuels. L’analyse est juste et fidèle, ne prend aucun parti et permet de voir les choses d’un œil extérieur. Le lecteur “ néophyte ” en la matière comprend le sujet exposé par AMD grâce à des exemples pertinents. Pour le lecteur plus avisé ou expérimenté, les nombreux exemples l’enrichissent et lui permettront de faire des comparaisons, de confronter ses analyses à celles de l’auteur pour en tirer de nouvelles perspectives de recherche.

J’aurai préféré une analyse profonde de chaque point, que l’on ressente la position de l’auteur

Cependant, il convient de noter que comme tout œuvre scientifique, il y a eu des limites. C’est ce qui fait d’ailleurs la différence entre les romans et les essais. Dans les romans, la plume appartient à l’auteur. L’auteur peut façonner ses écrits à sa manière alors que tel n’est pas le cas dans le second genre cité. Ainsi, je trouve que dans ce livre, l’analyse a été parfois superficielle. Si l’on a peut-être l’habitude de lire René Dumont, l’on peut s’attendre à des choses extra. J’aurai préféré une analyse profonde de chaque point, que l’on ressente la position de l’auteur. À un moment donné, j’ai cru ne lire que des résultats d’enquête sans déduction. Je trouve aussi que les « perspectives » devraient être plus pertinentes à chaque chapitre pour mieux orienter le lecteur. J’ai donc retenu que Diop, en s’attachant à exposer les résultats, tente de laisser au lecteur une libre interprétation. Aussi, nous donne-t-il les moyens de penser par nous-mêmes cette situation au-delà des préjugés et de la bien-pensance.
D’un point de vue méthodologique, l’enquête est de type qualitatif et quantitatif par moment. La zone d’étude est une commune de la région de Louga. L’étude pouvant se faire dans n’importe quelle commune du Sénégal, aucune ambiguïté ne se pose dans le choix de cette commune. Toutefois, je pense que l’auteur pouvait enrichir davantage son analyse. Si, par exemple, des investigations profondes dans des communes situées au cœur du Bassin Arachidier – qui font partie des zones les plus mouvementées par l’agriculture du pays et où les réalités sont en perpétuelle transformation- étaient faites.

Par ailleurs, l’auteur a très peu abordé le Genre en paysannerie, juste brossé. Un chapitre entièrement dédié à la femme en milieu rural n’aurait pas été mal. Pour que l’on sache ce qu’il en est profondément. Mis à part cela, j’ai sans doute aimé l’emploi des mots wolofs pour ne pas trahir le sens des termes. Mais je trouve que les mots en langue locale étaient récurrents. Le glossaire est bien détaillé certes mais dans certains cas il devenait lourd de retourner voir la signification d’un mot. Je termine par dire que c’est un livre à lire. Par l’agronome ou l’apprenti, le dirigeant ou encore toute autre personne engagée pour le développement territorial.

Cet article est une contribution de Maguette Sembène, élève ingénieur agronome en 4ème année.

    1. Sika 10 juillet 2019
      • L'homme Takander 22 avril 2020

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